vendredi 22 juillet 2011

Big Business




A l’origine duo basse/chant-batterie composé de Jared Warren et Coady Willis. Formé en 2004, le combo a à son actif le massif Head for the shallow quand il devient la section rythmique des Melvins en 2005. Union des plus harmonieuses, le big-biz s’illustre en effet dans un punk/sludge/stoner manifestement inspiré par le groupe de Buzz Osborne. L’album (A) Senile animal des Melvins en boîte, Big Business assure régulièrement les premières parties de la tournée, Crover et Osborne les rejoignant ensuite sur scène pour le show des Melvins. En 2007 paraît Here comes the waterworks. Les compères s’adjoignent les services de David Scott Stone pour des doses homéopathiques de guitares et de claviers. Un nouveau rouleau compresseur. Récidive en 2009 avec Mind the drift, le duo devient un powertrio avec l’arrivée aux guitares de Toshi Kasai.

Big business a fait récemment l’annonce de nouveaux morceaux en préparation et de l’intégration d’un nouveau membre en la personne de Scott Martin à la guitare. S’il semble que Toshi Kasai se soit momentanément éloigné du groupe pour honorer d’autres engagements, les prochaines productions de Big Business devraient être celles d’un quatuor.

Pour l’heure, les trois albums studios de Big Business pris dans leur ensemble concilient de façon exemplaire cohérence et évolution, chose assez rare pour être remarquée, et signalée comme remarquable. Pour cause, Warren, Willis, aussi bien que les membres plus récents sont des vétérans de la scène alternative américaine. L’intégration du duo original au sein des Melvins à des postes de premier ordre pour ce groupe donne une idée assez claire du niveau technique et de l’approche musicale du duo. Pour autant, Big Business ne se résume pas à un ersatz de Melvins. Les fans de ces derniers y trouveront plus que largement leur compte, c’est entendu. Ceci étant, Big Business institue l’influence Melvins en véritable sous-genre d’un punk-rock complexe, teinté de Noise, reléguant l’aspect Metal pour s’aventurer sur les terres du rock-psychédélique, voire progressif. Confère Here comes the waterworks et surtout Mind the drift.

Chacun des albums en date est un mur de basse-batterie d’une rare densité. L’incorporation progressive des guitares saupoudrées ici et là aura eu pour effet d’enrichir et rendre digeste et plus subtil un hardcore latent. Big Business, à l’instar des Melvins en leur temps, ne brille pas que dans la surenchère, mais s'illustre aussi par sa musicalité.

Enfin, il convient de saluer les prestations vocales de Jared Warenn qui magnifient littéralement ces trois albums. Beauté de la voix, ingéniosité des lignes mélodiques, intelligence des arrangements choraux, notamment à partir de Mind the drift. Clair ou écorché, fondamentalement rock n’roll, presque parfois lyrique ; le bassiste-vocaliste tire vers le haut ce combo à l’identité poisseuse. 

Peut être une des plus belles formations actuelles, à qui on souhaite de rester aussi constante et cohérente dans son évolution. Qu’on souhaiterait aussi voir sur scène en Europe, voire en France, et pourquoi pas avec les Melvins, et pourquoi pas prochainement ?

mardi 19 juillet 2011

Carnet de déroute: François Béru et les anges déchus



En 2001, François « Fanfan » Béru s’entoure d’ex-Banlieue rouge et d’ex-Molodoi le temps d’un album passé largement inaperçu : Carnet de déroute.

Fanfan, tribun libertaire et poète des squats, après 1989 a failli s’engager dans la légion étrangère avant d’étudier le vietnamien, puis l’histoire, pour devenir plus tard ingénieur de recherche en charge de la documentation sur Vietnam au CNRS. Carnet de déroute est un peu la rencontre de François Béru et de François Guillemot. On retrouve l’un devenu l’alter-ego de l’autre que l’on découvre un peu.

On embarque dans le Dernier train pour Lào Cai : riff à la Stooges, vraie batterie puis les intonations assagies de Fanfan Béru. Dés le deuxième couplet, l’expression « invitation au voyage » ne sera pas usurpée pour parler brièvement de ce disque. François Guillemot a une vraie écriture qui sait faire parler la nuit, la vitesse et les lumières. Une écriture qui a muri et développé la poésie des bérus, sa simplicité et ses images comme des reflets, mais imparables. Parfum de la misère nous fait retrouver la Danseuse de l’Orient, Comme on retrouvera plus loin un peu de Soleil noir ou même l’Hélène d’Hélène et sang dans Suzana de Sarajevo. Les figures féminines des bérus qui savaient toucher le romantisme de nous adolescents ressuscitées plus réelles encore dans l’univers glauque où  nous trainent maintenant les Anges déchus. Ceux là s’imposent comme un groupe de rock français capable, même si de circonstance. Quartier rouge enlace les guitares, l’acoustique et l'électrique qui rappellera Tom Verlaine ou Teyssot-Gay. On déambule dans une nuit chaude, embrumée et mélancolique bien filmée par le groupe. Où est la France confirme l’orientation « chanson » du projet. Format single, accessible et fédérateur, une ballade dévalée en hors piste par ces mêmes guitares distordues. La louve de Trà-Vinh synthétise toute l’entrée matière disque et éclaire la « petite fille aux yeux d’amande » de Vietnam, Laos, Cambodge dont l’ombre planait, prégnante. Une courte promenade diurne, un bref poème mis en musique. Quatrième pays et Carnassiers reviennent à des fondamentaux rock alternatifs dans leurs thèmes ou dans leur réalisation et dénotent presque en voulant relancer la machine. Retour au Carnet de déroute avec De l’autre côté du fleuve et détour par Sarajevo et un texte typiquement Bérurier avec Suzana de Sarajevo. Suit un morceau de bravoure : Petite fleur de Danang. Texte et composition quasi cinématographiques au pouvoir d’évocation remarquable sur lequel j’aime à clore ce voyage tortueux en compagnie de François Guillemot-Béru.

samedi 2 juillet 2011

Gene: Drawn to the Deep End




Aujourd’hui, en cherchant cet album sur Deezer, on le trouvera immanquablement accompagné d’une critique vraisemblablement  d’époque parue dans les Inrocks et signée Anne-Claire Norot. Un cas d’école: quatorze ans après la sortie d’un album, mettre en parallèle une écoute actuelle et sa réception. C’est éclairant. Assez peu sur les qualités de la galette en question, plutôt sur les aprioris de la journaliste et l’orientation hypee-yuppie de sa rédaction.

Pour mémoire, en 1997, le revival anglais porté par les grosses machines Blur et Oasis truste les ondes. Singles catchy et Rock and Roll circus médiatique sur fond de vieille guéguerre myth(olog)ique Beattles vs Stones. En 1997, Oasis commence déjà à sérieusement tourner en rond avec Be Here Now et Blur lorgne, cette année là, du côté du grunge-FM avec Blur.

Gene, dont Drawn to the Deep End est le troisième album, est un éternel outsider, loin même derrière les Suede, Pulp, un Kula Shaker émergent…etc. Le groupe restera de toute manière obscur, loin de l’engouement même éphémère qu’auront pu susciter les consorts plus haut cités.

Aujourd’hui, d'intéressant, on ne retient plus d’Oasis que son premier album. Les grimaces grungies de Blur sur l’album éponyme ont mal vieilli et pris une patine kitcheuse dont peuvent encore se délecter les inconditionnels; les autres s’en amuseront, tout au plus.

Aujourd’hui, quatorze ans après, Drawn to the Deep End s’écoute comme une petite perle discrète et subtile inscrite dans un contexte qui la survolait malgré elle. Un album élégant quoiqu’un peu foutraque, avec ses maladresses, certes, mais une indéniable atmosphère. On notera, en effet, que le chant peut fleurer le Morrissey, certaines progressions d’accords et un son général, évidemment rappeler les Smiths. Mais pas sans originalité, toutefois, et c’est peut-être ce qui aura déplu à Anne-Claire Norot en son temps. Il y a des grands anciens, pour chacun d’entre nous, auxquels on ne touche pas. Pour ma part, les Smiths, à haute dose, c’est juste chiant. Alors sur ce fond là, les petites originalités de Gene sont salutaires. La curieuse emphase des compositions en devient presque attendrissante. Le travail des guitares est tout à fait maîtrisé : propre, et ici encore, élégant, sans débauche d’effets et de virtuosité (cf Suede, pour comparer…). Pas de hit-single tape à l’œil, mais un beau disque cohérent et surprenant, une prod qui n’a pas mal vieilli au point de devenir de mauvais goût. Un disque, enfin, que ne dénigreraient peut être plus les inrocks d’aujourd’hui s’il devait côtoyer la production pop-rock actuelle : Gene passerait sans doute pour un groupe sincère, modeste et inventif.

L'album sur Deezer, avec sa critique par Anne-Claire Norot 

vendredi 25 février 2011

Diablo Swing Orchestra




Un mélange baroque de jazz, de sonorités slaves, manouches ou hispaniques souligné de metal et survolé par les vocaux lyriques d’une chanteuse au coffre puissant. Le tout est bien ficelé, orchestré et produit sans fautes de goût, si ce n’est quelques parties de chant masculin geignarde fortement inspirées de Muse ; influence repérable au passage également dans quelques riffs.

Passées les premières écoutes et l’attrait de la surprise, on peut regretter que l’originalité du groupe ne réside que dans la fusion à priori improbable de ces différents éléments. La base metal qui sous-tend le tout devient vite un bruit de fond assez peu dérangeant, proprette et convenue. Convenues, les influences jazzy ou folko-populaires le sont encore plus et se résument, au final, à des clichés. Ils sont toutefois bien amenés, le « montage » est bien foutu et l’ensemble se tient.

Diablo Swing Orchestra fait vite penser à ces groupes dont on se passe en boucle les albums pendant une saison et puis qu’on délaisse pour retourner à des choses moins tape à l’œil, mais au final plus consistantes.

Quelques morceaux, pourtant, plus aboutis, sur les deux albums en date, dont un sous licence Creative Commons, laissent pourtant penser que les suédois pourraient bien mûrir et surprendre, à l’avenir, en ne faisant justement pas trop recuire la recette. 

Site officiel:

The Butcher's Ballroom sur Jamendo: